Le 1er groupe Saint-Jean Berchmans

M. Guido Morel passe ses vacances de 1926 à étudier le scoutisme. Il discute ses idées et ses projets avec ses voisins, entre autres, M. l’abbé Desrosiers, directeur d’école, M. Dubuc, un vétéran des oeuvres, et quelques professeurs. De ces hommes, il se ménage la sympathie et la collaboration.

Septembre approche. Avec la rentrée des classes, il est décidé qu’on tiendra les premières réunions du nouveau mouvement scout. M. Zénon Alary, le curé de la paroisse St-Jean-Berchmans, était un homme merveilleusement préparé à accueillir favorablement cette formule nouvelle d’éducation nationale.

Au début de septembre, M. Morel demande donc un rendez-vous à M. Alary, dans le but de lui exposer longuement ses projets, de lui souligner l’opportunité de ce mouvement nouveau qu’il se propose de lancer, et d’obtenir la permission de commencer aussitôt dans sa paroisse. M. Alary a lu sérieusement la série d’articles sur le scoutisme et il prévoit le plaidoyer de M. Morel. À mesure que celui-ci énumère et détaille ses arguments, il se souvient de ce qu’il a lu. Il peut juger à son aise de la maturité d’esprit de son visiteur, de sa puissance d’assimilation et de sa force de compréhension.

Enfin, M. Alary accorde son parrainage. Lui-même jouera le rôle d’aumonier de la jeune troupe. Malheureusement, il ne trouve pas de salle de réunions à offrir aux scouts. M. Morel a prévu. Il suggère de vider le sous-sol de la sacristie de la rue Cartier et de creuser. Tous deux se rendent immédiatement sur les lieux, constater du travail que ce défrichage nécessitera. M. Morel s’offre à creuser et à construire avec ses premiers scouts. M. le curé s’étonne de sa hardiesse. M. Morel proteste de l’énergie des enfants. Il trouve que ce travail est dans l’esprit du scoutisme. Il y voit là une première épreuve épuratrice et bienfaisante. Sur tant d’insistance, la décision est prise, ce coin appartiendra à la troupe.

Durant la retraite qui suit la rentrée des classes, M. Morel jette les yeux sur quelques élèves modèles. Il les rassemble après la classe et leur propose une promenade à la montagne pour le samedi suivant, le 13 septembre. Tous acceptent.

Ce matin-là, pas un ne manque au rendez-vous. Le tramway les conduit tous coin Mont-Royal et avenue du Parc. De là, la jeune troupe se lance à l’assaut du Mont-Royal ; elle longe le cimetière protestant et se dirige ensuite vers le calvaire du cimetière catholique. En route, elle s’essaie à faire un peu d’observation. En divers endroits, elle se ménage des haltes. Ici et là, elle tente de nommer quelques-uns des nombreux clochers qui se dressent sous leurs yeux. Puis, c’est la chasse aux feuilles et aux fruits. Les courses font oublier la fatigue de l’ascension. Quelle joie ! D’étape en étape, elle parvient enfin au plus haut sommet et de là elle se dirige vers le calvaire recherché. Bientôt, quelqu’un l’aperçoit. C’est au premier rendu. À ses pieds, on cause et on collationne. On repasse les péripéties de la montée, les difficultés rencontrées, les efforts fournis, etc. Tous communiquent leur bonheur à M. Morel et manifestent le désir de recommencer. La fondation de la première troupe d’éclaireurs est accomplie. La petite bande s’agenouille et, au pied de la croix, dans une première prière scoute, elle remercie le bon Dieu des grâces reçues. Puisse cette même grâce descendre abondante sur l’œuvre naissante.

Les éclaireurs revenus à la paroisse n’attendent plus maintenant que l’heure où ils entreront dans leur local, dans le dessous de la sacristie que M. le curé vient de leur concéder. L’énormité de la tâche à accomplir ne les effraie pas. Ils ne disposent pas de cinq pieds carrés de surface. Qu’importe, ils sont prêts à tout.

“Relevez vos manches et à l’œuvre les gars, on se fait un “chez-nous”.” Dieu sait ce qu’ils en sortent du vieux fer, du vieux bois, plein de clous, de ciment et d’échardes ; ce qu’ils en transportent des tonnes de pierre, de cendre et de terre. Ils travaillent durant des mois, à la fin des classes et les jours de congé. Ces gars, que certaines personnes appellent des gamins parce qu’elles ne les comprennent pas, vendent le fer, le bois, la pierre, la cendre, la terre afin de s’acheter des cordes pour apprendre à faire des nœuds, et afin de s’acheter du bois pour se confectionner des armoires.

Dès le début, ils ont la mystique du scoutisme. Les épreuves d’aspirant s’apprennent et se passent au milieu du branle-bas et du tintamarre du local en construction.

“Nos amis, dimanche, course au bois… Qui apportera un chaudron, des patates, des carottes, etc ?… Moi ! Moi ! Voici le programme de la journée : communion, messe, déjeuner et départ en chantant.”

Le chef se mêle à la bande. Rendus sur place les petits gars restent ébahis: voilà un homme qui non seulement ne nous défend pas de faire du feu, mais nous montre comment le réussir, le construire, l’alimenter et s’en servir. Est-ce vraiment un professeur de notre école ? Il ressemble si peu aux autres ! Et ce que l’on fait, comme ça ressemble peu à la classe !

L’année passe heureuse, débordante, délirante d’enthousiasme. Un souffle d’héroïsme soulève ces jeunes cœurs. Les témoignages de succès affluent. Les mamans sont renversées de la serviabilité de leurs gars à la maison. Les professeurs signalent d’étonnants progrès dans les succès et la conduite en classe des éclaireurs. Ces enfants sont prêts à entendre l’appel à la vie chevaleresque.

“Je vais à la troupe…” cela ne dit pas tout ce qu’il y a de familier et d’intime dans la vie commune des éclaireurs. Changeons le nom du local, propose quelqu’un, baptisons-le. – Comment l’appellerons-nous, cet endroit où l’on vit si heureux ? Les suggestions s’offrent nombreuses. Le chef écoute,il veut que la décision vienne des gars eux-mêmes. Tout à coup, un tout petit, épris du cachet mystérieux et légendaire qui pénètre les vieux murs de ciment et rêveur devant le peu de lumière qui s’infiltre par de très petites fenêtres sous les barreaux de fer, lance du fond du coeur ce cri : “Nous le nommerons “Le Cachot”. Les figures s’épanouissent. Oui, oui, “le cachot”. Immédiatement, une cérémonie s’improvise pour fêter le baptême de ce sous-sol. On fabrique un goupillon avec de la ouate fixée au bout d’un bâtonnet et on asperge les murs en disant : “À l’avenir, tu t’appelleras Cachot.” Plus tard, les anciens aimeront revenir se refaire l’âme sous la noire et immense poutre de fer, à la hauteur d’un petit gars, dans ce “cachot” sous la sacristie.

Petite histoire de « La Crypte »

Local de rangement, sous la scène côté sud – Église St-Jean-Berchmans

Lors de la réouverture du 1er Groupe scout St-Jean-Berchmans en 1995, les animateurs Clément Chaput et Ramon Sepulveda explorèrent les locaux mis à leur disposition dans le sous-sol de l’église. Ils y trouvèrent, entre autre, un espace bas de plafond dont l’accès était bloqué par un panneau de bois. Après cette exploration, le panneau fut remis en place et l’espace encombré de terre et de débris retomba dans l’oubli, jusqu’à ce que…

… En 2002, le 1er Groupe comptait plus de 80 membres et avait réussi à récupérer le matériel de 2 autres groupes scouts qui fermaient leurs portes. Un urgent besoin d’espace de rangement se fit tout de suite sentir et força les nouveaux animateurs de la Troupe, Éric Simard et Éric Deschênes, auparavant animateurs aux louveteaux du même Groupe, à explorer le dessous de la scène dont ils avaient auparavant entendu parler. Une demande fut ensuite adressée au Père Michaud afin d’obtenir la permission d’enlever la terre et d’aménager le local pour y entreposer le matériel non périssable et les poteaux de tentes appartenant au 1er Groupe.

L’autorisation leur fut accordée, mais le père Michaud adressa tout de même la mise en garde suivante à la Troupe qui allait s’occuper du déblaiement : le local qu’ils allaient aménager avait déjà servi de crypte pour inhumer les prêtres de l’église avant sa rénovation en 1938. Toutes les sépultures avaient été retirées et les dépouilles ramenées à un cimetière local, sauf une sépulture que l’on avait jamais réussi à localiser ! Le Père Michaud demanda donc à la troupe de faire bien attention s’il advenait que des ossements soient découverts durant l’excavation, et de l’en aviser au plus tôt si jamais une telle trouvaille survenait. La dépouille qui n’avait pas été retracée était celle du Chanoine Cedris Amri.

Pendant 2 ans, de 2002 à 2004, la troupe d’éclaireurs s’affaira à enlever les débris et la terre afin d’aménager le local. Ils prirent les premières 15 à 20 minutes de la plupart de leurs réunions pour pelleter et sortir la terre à l’extérieur et, petit à petit, le local prit forme. Des cases pour les nombreux poteaux de tentes fut assemblées et installées à cet endroit ainsi que des vieux coffres pour servir d’armoires de rangement. L’électricité y a été installée par Éric Simard et Jocelyn Saint-Jules, tous deux anciens Chefs du 1er Groupe. Ajoutons-y quelques tablettes et deux anciens présentoirs de magasin ayant été gracieusement offerts à la troupe et voilà, le tour est joué ! Pour faire honneur à l’ancienne vocation de cet espace, le local est unanimement nommé : « La Crypte » par l’équipe d’animation du 1er groupe, en 2004.

Une petite partie du fond de ce local de 54 pouces de hauteur reste toujours à déblayer en cette année du 85ème anniversaire du 1er Groupe Saint-Jean-Berchmans. À ce jour, aucun ossement n’a été découvert durant les travaux mais, lors des couchers des unités du 1er Groupe dans le sous-sol de l’église, il n’est pas rare que certains membres des unités entendent, pendant la nuit, des bruits provenant du côté sud de la grande salle ! Il s’agit sûrement de l’esprit bienfaisant du Chanoine Amri, qui veille sur l’église !

Éric Simard, 1ère Troupe St-Jean-Berchmans, Février 2007

Historique du 1er groupe

  • Notes prises par Eric Simard à la journée invitation du 75e anniversaire du groupe auprès d’anciens qui étaient présents.
  • Autour de 1960, les animateurs et les jeunes louveteaux et éclaireurs du groupe ont formé des chorales pour la messe de minuit à l’église, suite au démantellement de la chorale permanente.
  • La peinture murale du petit local nommé ‘Maîtrise’ et re-baptisé local Guido Morel en 2007, a été effectuée à la saison 1963-64 par les animateurs louveteaux: Réal Cantin, Paul Sparardio, Gilles Leduc et Pierre Archambault.
  • Les membres du poste Pionnier SJB, à sa fondation, le nommèrent 1er Poste TNT St-Jean- Berchmans.